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[Robert Sabatier]

 

L'enfant sauvage
[
El niño salvaje]

 

 

L'enfant sauvage

Au dernier rang de la classe un rebelle
Voit de l'automne une langue rougeâtre
Lécher la vitre. II coulera du sang
Dam la ruelle où roulent des oranges.

Un livre ouvert vale dans un bruit d'ailes.
Le doigt dans l'encre il dessine des monstres
Sur le bois sombre où les noms sont gravés
D'écoliers endormis dans le temps.

Une rature un imtant le rassure
Car il y voit les cris verts d'herbes folles.
II vagabonde en lui-même, il se livre
À des exploits d'empereur cosmonaute.

Il peint sa joue avec de l'encre mauve 
Et des tribus indiennes le rejoignent. 
Cet inventeur d'autres cosmogonies
Sera puni de chérir sa durée.

Quel est le mot qui déchire les lèvres,
Fait éclater les louanges perclues?
Printemps, Printemps... répète le barbare,
Printemps, Printemps, comme on appelle un tigre.

Rien ne répond. Naguère un bonnet d'âne
Et le vainqueur était qui le portait,
Mâchant sa gomme et rêvant de vengeance
Au coin fleuri de toiles d'araignées.

Crisse la page au rythme des dictées.
Las d'ânonner de vieilles montgolfières,
L 'enfant s'envole au-dessus de la ville
Pour se brûler les ailes au soleil.


                                                                      [L 'oiseau de demain]
 

Δ

El niño salvaje

En la última fila de la clase un rebelde
contempla del otoño una lengua rojiza
que lame los cristales. Ha de correr la sangre
en esa callejuela donde ruedan naranjas.

Un libro abierto vuela con un rumor de alas.
Mojando el dedo en tinta él va trazando monstruos
en la madera oscura grabada con los nombres
de escolares dormidos en el tiempo.

Un borrón un instante le apacigua pues ve
en él los gritos verdes de las hierbas silvestres.
Va vagabundeando por sí mismo, se entrega
a hazañas de monarca cosmonauta.

Se pinta una mejilla con tinta color malva
y unas tribus de indios caminan a su encuentro.
Este inventor de otras visiones cosmogónicas
recibirá el castigo de amar su duración.

¿Cuál es esa palabra que desgarra sus labios,
y hace estallar los elogios tullidos?
Primavera, repite el bruto, primavera,
primavera, repite, como quien llama a un tigre.

Nada responde. Antes quedaba vencedor
el que era castigado con orejas de burro,
el cual mascaba chicle soñando en su venganza
en el rincón floral de telarañas.

La hoja rechina al son de los dictados.
Harto de balbucir viejos aeróstatos
sale volando el niño por sobre la ciudad
para abrasar sus alas en el sol.
 

[Dieciocho poetas contemporáneos, Selecció, traducció i pròleg d'Enrique Moreno Castillo Lumen, Barcelona 1998]

Δ

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