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Ce qui de tout homme paraît dans la hauteur, je dois
Encore l'élever. Car sa misère est elle-même
Un des modes de l'apparence. Et la réalité
Veut qu'ici j'aie été jeté, sel de l'incertitude,
Sur la neige intacte du temps, ne sachant rien, n 'ayant
Rien vu, et si vite oublieux qu 'il faut tout réapprendre
Achaque instant.
Ainsi par la vitre de l'autobus
Dont la fraîcheur suffit le soir à mes tempes, le ciel
Depuis longtemps perdu s'éclaire a nouveau dans les yeux
D'un enfant qui regarde.
Il est bon de pouvoir aussi
Faire don aux petits d'un simple bout de bois ou d'un
Caillou recueillis sur le bord indistinct du désordre
Où mes doigts gouvernés ne trouvent plus le libre fil
Qui gouverne. Et, comme un soleil invisible touchant
Le flanc d'un nuage, en retour m 'effleure la lumière
De l'émerveillement ouvert entre leurs doigts qui prennent
Sans jamais l'assombrir la Jure offrande, le Présent.
Cependant n 'est-ce las dans l'indistinct qu'ils vagabondent
Eux aussi, pareils aux petits de la louve ou du tigre
Qui savent tout de l'innocence?
- À la fin nous voici
Nous, durement parachevés par l'amour et le crime
Comme deux miroirs opposés ou s'effacent nos bornes
Dans l'espace illusoire d'un salut: rien ne répond
A l'emphase de nos paroles; rien jamais ne suit
Nos gestes éperdus dans un désir de conséquences
Et rien, entre les dés hasardant l'un ou l'autre nombre,
Ne décide. Mais il y a
comme une bienveillance
Dans les bras du sommeil qui ne sont les bras de personne,
Dans le ruissellement figé de la pierre, dans l'eau
Ancrée a sa lente, dans l'herbe infatigable, dans
Les mots sur nos lèvres parfois nés d'une autre semence,
Et la longueur du soir sous les arbres;
comme un élan
De l'obscur vers le seuil en nous brisé de la lumière.
[Récitatif]
Δ
Benevolencia
Lo que se muestra elevado en cada hombre, yo debo
alzarlo todavía más. Pues su misma miseria
es uno de los modos de la apariencia. Y la realidad
quiere que yo haya sido arrojado aquí, sal de la incertidumbre,
sobre la nieve intacta del tiempo, sin saber nada, sin haber
visto nada, y olvidándolo todo tan deprisa que he de volver a aprenderlo
a cada instante.
Así por el cristal del autobús
cuyo frescor, a la tarde, es suficiente para mis sienes, el cielo
perdido desde hace mucho se ilumina de nuevo en los ojos
de un niño que mira.
También es bueno poder
regalar a los pequeños un simple trozo de madera o una
piedrecilla recogida en el borde indistinto del desorden
donde mis dedos manejados no encuentran el hilo libre
que maneja. Y, como un sol invisible que toca
la entraña de una nube, de rechazo me roza la luz
del asombro abierto entre sus dedos que toman,
sin ensombrecerla nunca, la pura ofrenda, el Presente.
Sin embargo, ¿no vagabundean ellos también
por lo indistinto, semejantes a las crías de la loba o del tigre
que lo saben todo de la inocencia?
-Finalmente aquí estamos,
duramente perfeccionados por el amor y el crimen
como dos espejos opuestos en los que se borran nuestros límites
en el espacio ilusorio de una salvación: nada responde
al énfasis de nuestras palabras; nunca viene nada después
de nuestros gestos exasperados en un deseo de consecuencias
y nada, entre los dados que lanzan al azar un número u otro,
decide. Pero hay
como una benevolencia
entre los brazos del sueño que no son los brazos de nadie,
en el fluir inmovilizado de la piedra, en el agua
anclada a su pendiente, en la hierba infatigable, en
las palabras sobre nuestros labios a veces nacidas de otra semilla,
y la lentitud del atardecer bajo los árboles;
como un impulso
de lo oscuro hacia el umbral en nosotros roto de la luz.
Δ
[Dieciocho
poetas contemporáneos, Selecció, traducció i pròleg
d'Enrique Moreno Castillo Lumen,
Barcelona 1998] |
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